• Tu le manges mon gigot ???

    Tu le manges mon gigot ???

     

    Nous nous connaissons bien maintenant.

    Je crois qu'on peut donc se permettre de se dire les choses, et d'aborder un sujet épineux.

     

    Les beaux-parents.

    A savoir, les bienheureux géniteurs de ta douce moitié.

     

    Ceux-là même pour lesquels tu redoubles d'égards et de politesses, feignant l'intérêt pour les nombreux travaux de couture de belle-maman (interminablement détaillés par le menu à chaque visite dominicale), souriant aux blagues incongrues de beau-papa, et remerciant chaleureusement l'hôtesse pour son accueil et la finesse de ses mets.

    Mon côté fille modèle sans doute, mon éducation rigoureuse peut-être, ma fuite du conflit, mon envie de faire plaisir à mon amoureux sûrement, ont voulu faire de moi la belle fille idéale.

    (Ce à quoi quelque esprit railleur me répondrait que la belle-fille idéale est à la belle mère ce que le Yéti est au chasseur : une vaste rumeur, véritable fumisterie)

     

    Durant deux longues années de mon incroyable existence, j'ai donc usé de tout mon savoir-vivre et de ma patience, pour apprivoiser mes beaux-parents.

    Investie dans cette quête du Graal, j'avais parfois dû sacrifier ma personnalité et mes goûts sur l'autel de la courtoisie. En effet, comment dire avec bienveillance à la couturière la plus acharnée du continent, que je DE-TES-TE la broderie, le crochet, le point de croix (et autres techniques dont le nom m'échappe) ?

    Nota bene, je reconnais être sensible au patchwork.

     

    Bref, je voulais incarner la belle fille idéale.

     

    Mais tout ça c'était avant.....le gigot d'agneau.

    Alias la plus grosse crise diplomatique qu'ait connue l'histoire de la belle-famillosité.

     

    Je m'explique, ma belle-mère nous invite pour le traditionnel repas familial du dimanche, et nous laisse le choix du menu : à savoir mouton ou agneau.

    Et pour situer le contexte, je tends à devenir végétarienne. Après diverses lectures (dont je parlerais ultérieurement), et reportages, j'ai décidé par éthique de ne plus consommer de viande depuis quelques mois.

    A ce propos, je vous invite chaudement à découvrir et soutenir L214, brillante organisation de défense des animaux : http://www.l214.com/

     

    L'ouverture d'esprit de mes beaux-parents étant ce qu'elle est, je ne leur ai jamais parlé de mes convictions. Je n'ose pas. Et ils ne comprendraient pas, ne jurant que sur le sacro-saint roti, et son acolyte intouchable le gigot.

    Dorénavant, ces temps de repas partagé me crispent, devenant une angoisse muette.

     

    Suite à la proposition de menu, mon cher et tendre opte donc pour le mouton, lequel des deux ayant au moins passé le stade de nourisson.

    Les jours passent, et vient le repas tant redouté, au cours duquel on nous présente....de l'agneau. Autrement dit, PAS DU TOUT CE POUR QUOI ON AVAIT OPTE.

    (On sent que je suis énervée, ou bien ??!)

     

    Voyant le plat arrivé, je blêmis, je blanchis, bredouillant que je ne saurais pas en manger.

    Au regard accusateur et désapprobateur de mon beau-père, je réponds avec lacheté que je ne pourrais en prendre qu'un petit morceau (auquel je n'ai finalement pas touché, secouru par mon homme qui me l'a discrètement subtilisé).

    Et le paternel qui me désavoue et me réprimande sévèrement telle une enfant, qui ne fait pas "honneur à (sa) femme qui a cuisiné toute la matinée", je cite.

    Il l'a répété 7 fois au cours, et à l'issue, de cet interminable et gênant déjeuner. Sans disimuler son plaisir, ma belle-mère n'a, quant à elle, dit mot.

    Leur filston aura tout de même laché timidement, telle une bouée canard jetée dans un océan déchainé, un "elle préfère les légumes", lui-même n'osant prononcer ce qui semblait indicible, inacceptable, inavouable : je ne consomme pas de viande, je ne mange pas d'animaux morts, et a fortiori encore moins leurs nouveaux-nés. 

     

    Depuis, je suis très en colère.

    Contre eux, qui m'ont malmené pour un morceau de viande, alors que j'avais bêtement tout tenté pour leur plaire.

    Et contre moi-même, qui ait malmené mes plus profondes convictions, par consensus et lacheté. Qui me suis niée.

    Pardon agneau, comment peut-on te manger ?

     

    Plus jamais je ne me fourvoyerais, ni ne te trahirais.

    Je demeurerais moi-même, avec mes convictions, mes choix et aussi mes aspérités.

     

    « La gueule de bois

  • Commentaires

    1
    Petit coeur de Belin
    Samedi 2 Août 2014 à 08:20

    Comme je te comprends... même si ma belle-mère n'aurait jamais été vexée que je lui refuse un plat. Reste toi-même tu as raison!! Il est déjà difficile de suivre une conduite qu'on s'est fixé, alors s'il faut en plus tenir compte des esprits étroits...!!! bisous ma belle

     

    2
    Petit coeur de Belin
    Samedi 2 Août 2014 à 08:21

    NB: J'adore toujours autant ton écriture!! Vivement le bouquin cool et je suis sérieuse!

    3
    Samedi 2 Août 2014 à 09:34

    Merci beaucoup petit coeur de Belin !  ;-)

    • Nom / Pseudo :

      E-mail (facultatif) :

      Site Web (facultatif) :

      Commentaire :


    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :